Guinée : Les résultats du référendum constitutionnel, sur fond de boycott et de contestation

Le gouvernement guinéen a annoncé dans la nuit de mercredi les résultats globaux provisoires du référendum constitutionnel tenu le 21 septembre. Le « oui » l’emporte avec 89 % des suffrages exprimés, selon le ministre de l’Administration du territoire, Ibrahima Kalil Condé, sur fond d’un taux de participation officiellement estimé à 86 %. Des chiffres aussitôt rejetés par l’opposition, qui dénonce une consultation sans base légitime ni inclusivité politique.


Un scrutin validé sans consensus

Le processus référendaire a été piloté de bout en bout par l’exécutif dirigé par le président de la transition, le général Mamadi Doumbouya, sans véritable dialogue avec les partis politiques d’opposition ni les organisations de la société civile. Ces derniers avaient massivement appelé au boycott du scrutin, qualifiant l’exercice de « mascarade » ou encore de tentative de « blanchiment du coup d’État » d’octobre 2021.

Selon les chiffres lus par Djénabou Touré, directrice générale des élections, le soutien au « oui » a été particulièrement fort dans les bastions proches du pouvoir. En Haute-Guinée, notamment à Kankan et Faranah – fiefs du président Doumbouya – le score atteint 96 %. A contrario, c’est à Conakry, la capitale, que le « oui » aurait recueilli son plus faible score (74 %), avec le taux de participation le plus bas.


Une opposition marginalisée

La contestation ne s’est pas fait attendre. Cellou Dalein Diallo, président de l’Union des Forces Démocratiques de Guinée (UFDG), a dénoncé dans une déclaration vidéo une « mascarade électorale » et une instrumentalisation des institutions à des fins de légitimation d’un pouvoir issu d’un putsch militaire.

L’opposition politique, regroupée au sein des Forces Vives, qui comprend notamment le RPG (ex-parti au pouvoir), l’UFDG, l’UFR, le FNDC, le Model et les Forces sociales, est soit en exil, soit réduite au silence. Plusieurs de ses figures sont détenues ou portées disparues, ce qui a alimenté les accusations de dérive autoritaire contre le pouvoir en place.


Des incertitudes sur la suite du processus

Malgré une apparente accalmie dans les rues le jour du scrutin, des tensions latentes subsistent dans le pays. Les restrictions d’accès à Internet, signalées pendant plusieurs jours, ont affecté la remontée des procès-verbaux de vote et soulevé des doutes sur la transparence du processus.

La Cour suprême, seule instance habilitée à valider définitivement les résultats, est désormais attendue pour clore officiellement le processus. Mais l’opposition, non représentée dans cette phase décisive, estime déjà que la légitimité du scrutin est entachée.

Le Premier ministre Bah Oury, jusqu’ici silencieux, doit s’exprimer dans les prochaines heures. Sa prise de parole est particulièrement attendue dans un contexte de fragilité institutionnelle, à quelques mois des promesses de retour à un ordre constitutionnel normal.


Une réforme constitutionnelle controversée

Le contenu de la nouvelle Constitution n’a pas fait l’objet de débats publics transparents. Plusieurs juristes et observateurs internationaux ont souligné l’opacité du texte, dont certaines dispositions pourraient, selon eux, renforcer les pouvoirs de l’exécutif militaire sous couvert de « refondation institutionnelle ».

Alors que la junte promettait un retour à la démocratie, ce référendum, organisé sans les principaux partis politiques, renforce les inquiétudes sur l’orientation réelle de la transition guinéenne.


 

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